cloche.gif
Vers 1364, sous Jean d’Arckel, successeur d’Englebert de la Marck. A cette époque notre vieux château connaissait une vie trépidante : fêtes, tournois, beuveries, chasses, etc se succédaient sans relâche. Une nuit d’hiver réunis autour d’une table chargée de cruchons, nos chasseurs avinés, chantaient à tue-tête, quand à un moment où ils levaient leur hanap pour boire à la santé de leur amphitryon, ils entendirent soudain un grand vacarme venant de l’extérieur. De forts coups de bélier étaient assénés sur la porte bardée de l’entrée de l’enceinte, et au haut de la tour, le guetteur s’époumonait à sonner l’alarme. C’était une bande armée venant de Maastricht qui sachant le château sans grande défense et favorisée par la nuit sombre, était sans être repérée parvenue à la grande porte. Nos chevaliers dégrisés se précipitèrent sur leurs armes et organisèrent la résistance. Déjà la porte menaçait de s’écrouler quand les défenseurs parvenus à sortir du château par une issue secrète prirent l’ennemi à revers et un combat acharné s’engagea dans la nuit noire. Dispersés dans les environs les gardes du fort qui n’entendaient rien de l’alarme ne rallièrent par leur garnison. Enfin, devant l’insuccès de leur attaque- surprise, la bande prit la fuite avec pertes; quant aux défenseurs, ils comptaient quelques blessés dont le châtelain qui, furieux, jurait de se venger.

Après cette échauffourée, Jean d’Arckel se creusait inutilement la tête pour trouver un moyen plus efficace que l’olifant du guetteur pour rassembler les hommes du bourg et des villages environnants obligés de venir au secours de la place forte; quand un de ses lieutenant lui suggéra de s’adresser à la bonne fée de Franchimont, toujours très empressée de venir en aide aux occupants de castel.

Il paraît que depuis toujours une fée se prêtant à toutes les métamorphoses : dame blanche, bouc, fleur, chèvre d’or, etc.protégeait le château. Cette protectrice, répondant à la demande du noble sire, lui assura que le meilleur moyen d’alerter les défenseurs de la forteresse serait les appels d’une cloche très puissante qui se situerait au centre de l’agglomération, en l’occurrence au faîte du beffroi de l’église, et mise en branle par un sonneur répondant à l’alarme du guetteur.Elle lui prédit que cette cloche résisterait à tous les bouleversements possibles et ne cesseraient de sonner que le jour de la mort du dernier de la race des d’Arckel. Le châtelain suivait ce conseil et en effet, en concordance avec les prophéties de la fée, cette cloche à résisté sans dommage à des tremblements de terre, aux séides du Téméraire,etc.

Mais les années passent et la grosse cloche installée uniquement pour alerter la population en cas d’attaque, connut d’autres usages : la réunion des notables, annonces de décès, d’inondations, d’incendie, etc. ce qui créait un véritable imbroglio.

Nous arrivons à la fin de l’an 1469, nos ancêtres, alors sous l’autorité de Prince évêque Louis de Bourbon, regagnaient leurs foyers détruits par Charles le Téméraire et cherchaient à se réinstaller dans leurs ruines, quand un envoyé du Prince vint convoquer les notables présents pour une réunion au château. Après un long réquisitoire concernant leur perfidie envers le Bourguignon, il leur défendit formellement de se servir de la grosse cloche pour leurs usages personnels.

Peu après la mort de Charles le Téméraire en 1477, Louis de Bourbon qui cherchait à attirer Guillaume d’Aremberg, vint avec celui-ci à Franchimont pour lui faire visiter le domaine, qu’il voulait lui céder; se doutant peu qu’il introduisait le loups dans la bergerie. La première nuit de son séjour au château, la dame de Franchimont apparut à de Bourbon et sous menace de mort lente lui ordonna de cesser ses représailles envers les malheureux Fanchimontois, de plus elle l’obligeait à participer très largement aux frais d’une nouvelle cloche à installer dans la tour de l’église et qui servirait exclusivement aux besoin de la population.

Subjugué par les menaces de la fée, Louis de B. dut s’exécuter et l’année suivante, la petite cloche était installée. Louis de Bourbon continuant à molester nos aïeuls la bonne dame dut encore intervenir et lui prédit alors que la fin de son règne ne serait pour lui qu’une longue pénitence bien méritée “et toi, dit-elle, qui a fait beaucoup souffrir mes pauvres gens de Franchimont à l’exemple de ton allié Charles, tu périras misérablement sous les coups de tes ennemis avant la fin de l’année 1482.

jpg_redeglise_st_hermes_et_alexandre2.jpg

Et voilà la légende des cloches qui, à peu près disparue, retrouva un regain de vie le 2/11/1848, jour où la petite cloche se brisa en la sonnant et plus tard ce fut le tour de la grosse cloche qui se fêla le dimanche de Pâques en 1863.

En 1943, l’enlèvement de nos meilleures cloches par les Allemands, en 1949, l’installation en notre église d’une nouvelle cloche, grâce à la générosité de feu notre curé J Cormeau, et en 1954, nouvelle installation, furent encore l’occasion pour ressusciter cette vieille légende. Certaine prédiction de la fée se réalisèrent, le Prince-Évêque Louis de Bourbon fut, en effet, accise le 30/04/1482 aux portes de Liège.

Après sa mort, le Sanglier des Ardennes s’empara de l’autorité et sans attendre la décision papale, fit proclamer l’un de ses fils comme évêque; mais ce fut Jean de Hornes qui, par l’autorité du Pape, fut reconnu à Liège.

Quant au jour de la mort du dernier de la race des Arckel, qui, d’après la fée devait coïncider avec la fin de la grosse cloche arrivée le dimanche de Pâques 1863, il est assez difficile de contrôler la véracité de cette prédiction donc aussi … dans le doute… abstiens-toi.

Regnier Tieffels
PDF n°3 – 1958

Retour en haut