L’usage des surnoms, des sobriquets que les habitants s’adressèrent de ville à ville, de village en village, tend à se perdre au pays des « agneux ».

La raison de cet abandon d’une des manifestations de l’esprit wallon où le hableur rivalise avec l’esprit, doit être trouvée dans le fait que, de moins en moins, nous usons du parler wallon si expressif et si caricaturiste.

L’extension des relations de la vie moderne est une autre des raisons. Les relations de village à village quasi exclusives au début de ce siècle se sont élargies, défavorisant cet esprit particulariste et régionaliste trouvant le temps mieux qu’actuellement pour passer ses loisirs à jaser, caricaturer, parfois même lancer des piques assez violentes.

Très répandu en Wallonie, l’usage des surnoms est commun dans la région verviétoise.

Les Verviétois sont des « matchèts » ou « pires à makète » ou encore « magneux d’pèlotes ». Le premier de ces termes désigne proprement les ouvriers teinturiers, le deuxième signifie bornes à tête arrondie, le troisième rappelle une famine de 1788- 1789, famine qui aurait obligé les habitants à aller dans les localités voisines, ramasser les épluchures pour s’en nourrir. Les Franchimontois sont affublés du nom de « verts vantrins » (tablier vert) , les soldats du marquisat de Franchimont auraient eu un uniforme blanc et vert. Les Spadois seraient les « bid’lîs » (loueurs de bidets, petits chevaux d’Ardenne). On a parfois qualifié les habitants de Spa de « torais », ceci sans commentaire.

Voulez-vous encore quelques autres surnoms ?
Polleur est la patrie des « Laweux », lanceurs de « lawes » (railleries, sarcasmes, brocards) ; on connaît dans le pays, la réputation du pont de Polleur.

À Desnié, sont les « Tchenn-leurs », (faiseurs de tchènas) ; à Winamplanche, les « Cawais » ; à Sart, les « Spotès coulars », parce qu’ils aiment la « coulèye » (le coin du feu).

En nous rapprochant de Stavelot, nous trouvons, paraît-il, des « Boûs d’Fagne » à Francorchamps et à Sourbroodt, des « Ba-ras » (béliers) à Ovifat.
Oserait-on dire que les « Coïtais » s’appellent « brèyâs » (braillards) parce que le bruit de leur cascade leur fait élever habituellement la voix.

A La Gleize, habiteraient les « magneus d’makèye ». On a connu jadis les « magneus d’salade », sobriquet donné aux soldats du Prince Evêque de Liège.

Un des surnoms les plus sarcastiques et très peu flatteur est assurément celui des gens de Creppe, près de Spa, qu’on appelle les « vais » (veaux).

On sait ce qu’il advint à deux « Creppelins » qui débarquaient un dimanche matin en gare du Nord à Paris. Désirant accomplir leurs devoirs dominicaux, ils s’installent dans un fiacre et demandent au cocher à les conduire à l’église la plus proche et l’automédon de répondre « fort bien, je vois que ces messieurs sont dévôts ». « N’arèdge ti nin’ ? » murmure un des deux voyageurs, « ui l’a dja veyou que n’z’estans d’Creppe ! »

« Pays de Franchimont »
B.P

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