Il reçut de sa bonne Mère du Ciel, sans doute, cet ultime privilège de nous quitter en la belle fête de l’Assomption, jour où se célèbre, là-haut aussi, le triomphe de la vie sur la mort.
Il partit simplement, sans bruit, comme il avait vécu et comme il eût désiré mourir.
Nous ne rencontrerons plus, le long de nos demeures, notre bon « curé » Boniver, allant à pas menus, s’arrêtant ici ou là, ou entrant par habitude chez l’un ou l’autre « cousin », histoire d’y « copiner » un peu, comme il aimait à le répéter.
Un penchant naturel l’avait poussé, à ses heures de loisirs, à l’étude de la petite histoire, de celle de Theux, notamment, qui était resté, à travers l’âge, son milieu de prédilection.
Ses notes historiques, toujours intéressantes, écrites sans prétention littéraire, ont apporté le plus souvent une lumière nouvelle sur les événements ignorés du passé.
Le « Pays de Franchimont » s’est toujours, fait un honneur, de publier les articles de ce vieux et fervent Theutois qui faisait parler nos vieilles pierres et nos vieux murs et qui trouvait à chaque nom de famille une origine acceptable et, s’il fallait… un blason.
L’esprit lui était resté lucide, la mémoire étonnamment fidèle, le ventre, un tantinet gaulois et caustique.
Il appartenait, incontestablement, à une des plus anciennes et des plus notables familles de la localité, une famille de maîtres de forges possédant des titres réguliers de noblesse et en particulier celui de Chevalier du Saint-Empire.
Le 2 septembre dernier, une grande joie de sa vie lui était réservée : l’arrivée, de Suède, en compagnie d’autres descendants de nos anciens batteurs de fer, d’un cousin authentique en la personne de C. Bonêvier, maître de forges à Mjolby.
Nous le voyons encore, au bras de cet arrière-cousin du Nord, déambuler par la rue Hovémont, vers la commune maison des ancêtres où la voix du sang les conduisait comme à une sorte de pèlerinage.
Ce fut un de ses derniers beaux jours. La mort guettait cet octogénaire étonnant. Le corps frêle, le front transparent, les mains légères semblaient parvenus à la limite des érosions de la vie. Le vent n’a pas eu à souffler, c’est faute de substance que tout s’est éteint un beau jour.
Il repose à présent dans sa terre natale qu’il a si profondément aimée et servie.
Nous garderons de Monsieur l’Abbé Boniver, le souvenir ému d’un prêtre simple et bon et d’un Theutois qui a fait honneur à la cité.

Spectator.

Pays de Franchimont 9 septembre 1948

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